Origine de la philosophie, et évolution historique
L’histoire de la philosophie commence, en Occident, dans le monde de l'Antiquité grecque, vers le
VIIe siècle
av. J.‑C.. Avant même que le mot « philosophie »
soit en usage, et qu'il désigne par la suite une discipline à part
entière, on considère que la démarche intellectuelle des générations de
penseurs dits « présocratiques », étudiant principalement la physique,
marque une rupture avec les discours mythologiques, religieux et
poétiques qui existaient jusqu'alors, et forme à ce titre l'acte de
naissance de la philosophie occidentale. Dans la démocratie athénienne, au
Ve siècle
av. J.‑C., Socrate
va révolutionner cette approche et introduire les méthodes qui
resteront celles de la philosophie, en centrant ses réflexions sur les
questions humaines, et non plus sur la physique, et en répandant l'usage
de la dialectique et l'étude des définitions. C'est à Platon, dans ses célèbres dialogues,
que l'on doit d'avoir transmis l'héritage de Socrate et popularisé le
mot « philosophie », conçue comme une recherche de la vérité, en
particulier contre les discours trompeurs des prestigieux sophistes, habiles orateurs et maîtres dans l'art de persuader les foules.
La philosophie se développe alors suivant plusieurs domaines d'étude, comme une méditation sur la nature, l'âme humaine, l'éthique, la politique, et la connaissance. Aristote, élève de Platon, poursuivra ces recherches et inventera un certain nombre de sciences, comme la logique (science du raisonnement) et la zoologie
(étude des espèces animales). Dès son origine grecque, la philosophie a
donc partie liée avec différentes sciences, qui deviendront ensuite
autonomes au fil de l'histoire. Mais elle propose aussi une réflexion
sur la nature de la réalité ou encore de l'être lui-même (ontologie), qui deviendra une branche importante de la philosophie (la métaphysique). Les réflexions éthiques des anciens, poursuivies à l'époque hellénistique par les écoles Épicuriennes et Stoïciennes, qui se prolongeront dans l'Antiquité romaine,
mettent majoritairement l'accent sur la maîtrise des désirs et des
passions, proposant un idéal de sagesse en vue de mener une vie
heureuse.
À l'issue de l'Antiquité, les thèses de Platon, et surtout celles
d'Aristote, domineront la pensée philosophique, qui cherchera souvent à
les concilier avec la religion chrétienne, musulmane ou juive : ainsi saint Augustin et les néoplatoniciens, dans l'Antiquité tardive. Au Moyen Âge, c'est principalement dans les monastères et en lien étroit avec la théologie
que se déploie le discours philosophique, à travers la traduction et la
discussion des écrits des Anciens, dans le monde chrétien et le monde
arabe. C'est ainsi la scolastique, synthèse du christianisme et de l'aristotélisme, dont Thomas d'Aquin
est à l'origine, qui est la philosophie dominante dans l'Europe
médiévale, assurant la vivacité de la dialectique et des travaux sur la
logique, comme en témoigne la célèbre querelle des universaux.
À l'époque moderne, les philosophes européens redécouvrent les Anciens lors du vaste courant humaniste de la Renaissance, et une philosophie politique nouvelle, plus réaliste, fait son apparition (Machiavel, Hobbes). Les penseurs s'inspirent, à partir du
XVIIe siècle, des méthodes de la science moderne en train d'apparaître (avec Copernic, Galilée et Newton),
pour développer une philosophie davantage centrée sur la subjectivité
de l'individu, placé désormais au centre de la construction des
connaissances (Descartes, Locke, Kant). Les philosophes sont encore souvent de grands scientifiques (Pascal, Leibniz, Descartes), qui ne conçoivent pas la philosophie séparément de la science, ni des réflexions sur la religion. Différents courants s'opposent concernant la nature des idées et des connaissances humaines, tels que l'innéisme et le rationalisme (Leibniz, Malebranche) contre l'empirisme (Locke, Berkeley, Hume).
C'est aussi l'époque où la métaphysique, l'Église et la Monarchie vont subir les critiques de la philosophie des Lumières (
XVIIIe siècle), Kant ruinant la prétention scientifique de la première par ses études sur les limites de la raison humaine, et d'autres philosophes s'attelant à combattre l'obscurantisme et la tyrannie par le projet encyclopédiste (Diderot, d'Alembert) d'une part, et des traités politiques recommandant le libéralisme, la tolérance (Locke, Voltaire) et le républicanisme (Rousseau) d'autre part. Par ailleurs, à partir du
XVIIIe siècle, la philosophie se détache peu à peu des sciences positives, plusieurs de ses branches devenant des disciplines autonomes (ainsi la science politique, la logique mathématique et la biologie).
À l'époque romantique, l'idéalisme allemand (Hegel, Fichte, Schelling)
approfondit la pensée de Kant, en proposant une philosophie
systématique réconciliant la philosophie de la nature et la philosophie
morale. Toutefois, à une époque de plus en plus marquée par les avancées
scientifiques et par l'idée du progrès chère aux Lumières, le positivisme (Comte)
va faire son apparition, condamnant la métaphysique au bénéfice des
sciences ; Comte invente d'ailleurs une science nouvelle : la sociologie.
Les progrès de la méthode expérimentale permettent en outre qu'une
branche importante de la philosophie prenne à son tour son autonomie :
la psychologie. Avec la révolution industrielle du
XIXe siècle, c'est un ensemble de courants d'idées davantage axés sur l'économie et la politique qui font leur apparition, tels l'utilitarisme (Bentham, Mill), le pragmatisme (Peirce, James) et le socialisme (Proudhon, Marx). La fin du
XIXe siècle est marquée par des penseurs qui bouleversent radicalement les anciennes doctrines (Nietzsche, Marx, Freud).
Au
XXe siècle, un courant de pensée majeur fait son apparition : la phénoménologie (Husserl). Ce courant de pensée, qui influence le structuralisme (Cercle de Prague, Lévi-Strauss), les entreprises de déconstruction (Heidegger, Derrida), la tradition herméneutique (Ricœur, Foucault) et l'existentialisme (Sartre), forme avec eux ce qu'on appelle aujourd'hui la « philosophie continentale ». On oppose habituellement cette dernière à l'autre grand courant de pensée du
XXe siècle, plutôt issu du monde anglo-saxon : la « philosophie analytique » (Russell, Wittgenstein, Quine), fondée sur la tradition logique et l'analyse du langage.
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Frise chronologique de l'évolution de la philosophie au cours des siècles. |
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